Programme
Pierre Schaeffer & Pierre Henry Symphonie pour un homme seul [1950] 21’22
Kristoff K.Roll Le petit bruit d’à coté du cœur du monde (variation 30) [2020 création] 1h04
Franck Vigroux Tension [2020 création] 20’00
Interprète : Eric Broitmann
Pierre Schaeffer & Pierre Henry Symphonie pour un homme seul [1950] 21’22
Version 12 mouvements, révision 1966 par Pierre Henry
1. Prosopopée I 2’58 »
2. Partita 1’12 »
3. Valse 0’58 »
4. Erotica 1’21 »
5. Scherzo 2’33 »
6. Collectif 0’57 »
7. Prosopopée II 1’02 »
8. Eroïca 1’57 »
9. Apostrophe 2’26 »
10. Intermezzo 1’57 »
11. Cadence 1’09 »
12. Strette 2’54 »
Il y a 70 ans était créé la première grande oeuvre de musique concrète.
Le titre de la Symphonie pour un homme seul doit être pris au sens étymologique du mot : «ensemble de sons». Le propos initial des auteurs était de composer une symphonie de bruits humains. En fait, envahis par la matière sonore et désireux d’obtenir un ensemble aussi expressif que possible, P. Schaeffer et P. Henry durent rapidement se limiter à quelques matériaux de départ, afin de chercher à construire une architecture cohérente.
La Symphonie pour un homme seul n’oppose pas le bruit au son musical ; elle s’efforce, encore maladroitement sans doute, de trouver une synthèse entre des bruits davantage musicaux et un concours instrumental non point trop éloigné des bruits.
La symphonie a été constamment remaniée depuis sa première audition le 18 mars 1950 (premier concert de musique concrète organisé par le Triptyque à l’Ecole normale de musique de Paris). La version définitive présentée comporte un numéro supplémentaire (6. Collectif). Celle utilisée pour le ballet de Maurice Béjart (onze séquences), est décrite ci-après :
Prosopopée I expose divers matériaux sonores formant une phrase initiale et se poursuit en un développement où alternent le piano préparé et la voix fredonnée.
Partita ménage un repos entre Prosopopée I et Valse, combinaison ternaire où des fragments vocaux sont opposés à des prélèvements orchestraux. Erotica suit, puis un Scherzo d’allure humoristique.
Prosopopée II reprend et développe certains motifs de Prosopopée I.
Eroica vient ensuite, puis Apostrophe, où se dégage le seul élément vocal explicite de toute l’œuvre : le mot ABSOLUMENT, un instant tiré de l’indistinct, se désagrège et retourne à la masse sonore.
Un Intermezzo assez lent, au verbalisme mystérieux, est suivi d’une Cadence, suspense qui prépare à la Strette, laquelle, après un début profond, termine l’œuvre sur une stridence éclatante et comme saturée de jubilation.
Cette œuvre, qui devait consacrer la collaboration de P. Schaeffer et de P. Henry, a connu une très large audience : elle a été radiodiffusée une vingtaine de fois, tant en France qu’à l’étranger ; elle a constitué à la fois la musique et l’argument du premier ballet de musique concrète que la Compagnie des Ballets de l’Etoile de Maurice Béjart et Jean Laurent a joué tout l’été 1955 au Théâtre de l’Etoile.
Biographies
Pierre Henry
Compositeur français né le 9 décembre 1927 à Paris, décédé le 5 juillet 2017 à Paris.
Après un parcours classique au Conservatoire de Paris (1937-47), Pierre Henry rencontre Pierre Schaeffer avec lequel il compose la Symphonie pour un homme seul (1950). Il dirige à la RTF le premier Groupe de recherche de musique concrète. Quittant la Radio en 1958, il fonde Apsome, premier studio privé consacré aux musiques électroacoustiques, puis dirige Son/Ré à partir de 1982. Il collabore avec de nombreux artistes et chorégraphes, notamment Maurice Béjart (Haut voltage, 1956 ; Messe pour le temps présent, 1957). Ses compositions d’un style d’abord épuré (Le voyage, 1962) font ensuite place à des œuvres de grande ampleur (Hugosymphonie, 1985). Compositeur également de musiques de film et de publicité, Pierre Henry est un explorateur des sons, défenseur d’une esthétique libre, pionnier en recherches technologiques. Citons encore la Messe de Liverpool (1968), la Dixième symphonie de Beethoven (1979), Pierres réfléchies (1982), Le livre des morts égyptien (1988), Intérieur/Extérieur (1996), Trajectoire (2007), Le fil de la vie (2012), Chroniques terriennes (2016).
Pierre Schaeffer
Compositeur, théoricien, chercheur, essayiste et romancier, Pierre Schaeffer est l’un des pères de la radiophonie expérimentale et de la musique concrète, qu’il définit comme un collage et un assemblage sur bande magnétique de sons préenregistrés à partir de matériaux sonores variés et concrets. Diplômé de l’École Polytechnique en 1934, il devient ingénieur des Télécommunications. En 1944, il crée un studio consacré à l’expérimentation radiophonique. En 1949, il est rejoint par Pierre Henry, avec qui il écrit notamment la Symphonie pour un homme seul. Il fonde ensuite, en 1951, le Groupe de musique concrète, qui devient en 1958 le Groupe de recherches musicales (GRM). À partir de 1960, il fonde et dirige le service de la recherche de l’ORTF. Considérant que la musique a besoin de chercheurs, il abandonne la composition, assure un séminaire de musique expérimentale au Conservatoire de Paris et rédige le Traité des objets musicaux, vaste réflexion sur la nature et la richesse de l’élément sonore. Citons parmi ses compositions Cinq études de bruits (1948), Orphée 53(1953), Étude aux objets (1959), Le trièdre fertile (1975).
Kristoff K.Roll Le petit bruit d’à coté du cœur du monde (variation 30)
Pour Futura, Kristoff K.Roll propose une nouvelle variation de Le petit bruit d’à côté du cœur du monde.
Le petit bruit d’à côté du cœur du monde est un hommage poétique à un bout d’Afrique rencontré, aimé. Hommage qui est né des sons ramenés de notre voyage en 1994 et que nous avons mille fois écoutés et réécoutés. Secret de la matière sonore que, dans un mouvement complexe, nous décelons et ensevelissons dans un construction imaginaire, fantasmatique, provisoire..
Biographie
Kristoff K.Roll est un duo d’art sonore né en 1990 à Paris au sein des « arènes du vinyle », septet de platines tourne-disques. Ensemble et séparément, le duo glisse de l’acousmatique à l’improvisation et au théâtre sonore en passant par l’art radiophonique, l’installation, la performance.Sur de longues durées ils tissent un temps mêlant l’écrit et l’improvisé.
Carole Rieussec et Jean-Kristoff Camps sont parmi les pionniers de l’explosion du studio de composition électroacoustique sur scène. Le studio et ses logiques sont devenus instruments de jeu improvisé live, alors qu’ils étaient jusque-là cachés du public. Ce « déplacement » a donné naissance à une grande effervescence sonore en France mais aussi en Europe. Les tables de jeu rassemblent machines électroniques, microphones, instruments « classiques » et divers objets de la vie quotidienne. Ces objets font référence aux cabines de prises de sons où les sonorités se créent à partir de matériaux les plus divers.
Attiré par toutes ces « choses » productrices de son, de sens et de magie potentielle, le duo a pour catalyseur d’expérimentation poétique la voix enregistrée. Ces voix placent la société au cœur de la dramaturgie.
L’esthétique de Kristoff K.Roll est celle de l’opaque et de la créolité. “ C’est entre les langues que nous rêvons et créons d’un même élan”.
Par ailleurs, Carole Rieussec et Jean-Kristoff Camps développent des esthétiques individuelles qui croisent et font résonance à celle du duo.
Le duo est membres du comité de rédaction de « revue & corrigée » ; animateur/trice radio sur Radio libertaire à Paris puis sur Radio Pays d’Hérault ; co-fondateur/trice du festival international sonorités, réalisateur/trice de la net rubrique audio wi watt’heure, dédiée au genre, et à l’expérimentation artistique.
Franck Vigroux Tension [2020 création] 20’00
Avec cette pièce je voulais composer une musique à l’allure dantesque mais dans laquelle chacun peut aisément inventer son propre récit. Le titre Tension est un simple clin à l’aspect très électronique de cette musique.
Biographie
français né le 14 mai 1973 à Marjevols.
Guitariste de formation, Franck Vigroux évolue dans un univers où se croisent musiques, sons industriels, théâtre, danse et vidéo. Il produit un large éventail sonore influencé par le blues (album Ciment), l’électroacoustique (Zaroff, commande d’Etat 2011), la noise music, la musique contemporaine et la musique expérimentale électronique.
Artiste protéiforme, il est alternativement guitariste, platiniste, électroacousticien, performer électronique, improvisateur, compositeur. Il conçoit également des spectacles transdisciplinaires mixant arts visuels, arts numériques, chorégraphie et mise en scène (Broken Circle, 2010 avec l’ensemble Ars Nova ; Tempest, 2012), et collabore avec D’autres cordes, compagnie dédiée aux arts de la scène.
Il travaille avec de nombreux artistes, dont les musiciens Reinhold Friedl et Marc Ducret, le metteur en scène Michel Simonot (Septembres, 2009), la chorégraphe Rita Cioffi (Nous autres ?, 2011), les écrivains Kenji Siratori, Philippe Malone, Laurent Gaudé (Tombeau pour Palerme, 2016), Rémi Checchetto, ainsi que les vidéastes et plasticiens Philippe Fontes, Antoine Schmitt, Kurt d’Haeseleer (Ruines, 2016), Scorpène Horrible.